dimanche 15 mai 2016

Antigone, Jean Anouilh

Note : *****


Présentation de l'éditeur:

Après Sophocle, Jean Anouilh reprend le mythe d'Antigone. Fille d'Oedipe et de Jocaste, la jeune Antigone est en révolte contre la loi humaine qui interdit d'enterrer le corps de son frère Polynice.
Présentée sous l'Occupation, en 1944, l'Antigone d'Anouilh met en scène l'absolu d'un personnage en révolte face au pouvoir, à l'injustice et à la médiocrité.
«L'Antigone de Sophocle, lue et relue et que je connaissais par cœur depuis toujours, a été un choc soudain pour moi pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges. Je l'ai réécrite à ma façon, avec la résonance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre.» Jean Anouilh.





L'oeuvre



L'auteur :
Jean Anouilh est écrivain et dramaturge français. Il est né le 23 juin 1910 à Bordeaux, en Gironconde. Son œuvre théâtrale, particulièrement abondante et variée, commence en 1932. Elle est constituée de nombreuses comédies et d'œuvres dramatiques ou tragiques comme sa pièce la plus célèbre, Antigone (1944), réécriture moderne de la pièce de Sophocle.
Anouilh organise lui-même ses œuvres en séries thématiques, faisant alterner Pièces Roses, des comédies marquées par la fantaisie tels que Le bal des voleurs (1938), et Pièces Noires, qui montrent l'affrontement des "héros" entourés de gens ordinaires, prenant souvent appui sur des mythes comme Eurydice (1941), Antigone (1944) ou Médée (1946).
Puis après la guerre apparaissent les Pièces Brillantes qui jouent sur la mise en abyme du théâtre au théâtre: La Répétition ou l'amour puni en 1947 et Colombe en 1951. Ensuite on a les Pièces Grinçantes qui consistent en des comédies satiriques comme Pauvre Bitos ou le Dîner de têtes (1956). Dans la même période, Anouilh s'intéresse, dans les Pièces Costumées, à des figures lumineuses qui se sacrifient au nom du devoir : envers la patrie comme Jeanne d'Arc dans L'Alouette (1953) ou envers Dieu comme Thomas Becket (Becket ou l'Honneur de Dieu en 1959).
Le dramaturge a continué dans le même temps à servir le genre de la comédie dans de nombreuses pièces où il mêle farce et ironie (par exemple Les Poissons rouges ou Mon père ce héros en 1970) jusque dans les dernières années de sa vie.
Jean Anouilh a également adapté plusieurs pièces d'auteurs étrangers, Shakespeare en particulier. Il a aussi mis en scène certaines de ses œuvres (par exemple Colombe en 1974), en même temps qu'il travaillait à des scénarios pour le cinéma ou à la télévision.
Il meurt en 1987, à Lauzanne.


Ma critique :

Commençant à lire Le quatrième mur de Chalandon, j'ai fait une pause pour lire Antigone, puisque cette pièce va se trouver au centre du livre.

Antigone, est la tragédienne qui mourra pour ses convictions plus que par amour, comme beaucoup de tragédiennes raciniennes, giralduciennes, .... Comme ces auteurs, Anouilh reprend une tragédie grecque pour mettre en exerce les maux de la société actuelle ; la seconde guerre mondiale, en l'occurrence.

En rendant ce pan de l'histoire accessible à tous, grâce à une écriture simple et une mise en scène épurée, Anouilh vise juste et on retient l'idée phare de cette pièce. Comment peut-on atteindre le bonheur lorsque l'humain est confronté au pouvoir, à la fatalité, à sa moralité et son orgueil ?
Doit-on défier les lois par respect pour les liens du sang, pour son intime conviction de justice humaine, morale ?

Il y a de très belles tirades sur ces thèmes de bonheur, de la vie, du rôle de chacun au niveau politique, au niveau humain.

Et bien sûr, on lit cette oeuvre en y cherchant les doubles sens qu'il a voulu faire vis à vis de l'occupation allemande, la collaboration et la résistance. C'est très finement amené.

Lecture plaisante, rapide et instructive. Je l'ai relu dans la foulée pour l'apprécier doublement.

Et maintenant, comment Sorj Chalandon s'en est inspiré ?


Quelques citations relevées :

La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, ferme tes mains, vite. Retiens-la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote, assis au soleil.
                                               ---------------------------------------------------
Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coûte que coûte... Moi, je veux tout, tout de suite, et que ce soit entier, ou alors je refuse! Je ne veux pas être modeste , moi, et de me contenter d'un petit morceau, si j'ai été bien sage.
 ---------------------------------------------------
Tous ceux qui avaient à mourir sont morts. Ceux qui croyaient une chose, et puis ceux qui croyaient le contraire — même ceux qui ne croyaient rien et qui se sont trouvés pris dans l'histoire sans y rien comprendre. Morts pareils, tous, bien raides, bien inutiles, bien pourris. Et ceux qui vivent encore vont commencer tout doucement à les oublier et à confondre leurs noms.
  ---------------------------------------------------
Comprendre... Vous n'avez que ce mot-là dans la bouche, tous, depuis que je suis toute petite. Il fallait comprendre qu'on ne peut pas toucher à l'eau, à la belle et fuyante eau froide parce que cela mouille les dalles, à la terre parce que cela tache les robes. Il fallait comprendre qu'on ne doit pas manger tout à la fois, donner tout ce qu'on a dans ses poches au mendiant qu'on rencontre, courir, courir dans le vent jusqu'à ce qu'on tombe par terre et boire quand on a chaud et se baigner quand il est trop tôt ou trop tard, mais pas juste quand on en a envie ! Comprendre. Toujours comprendre. Moi, je ne veux pas comprendre. Je comprendrai quand je serai vieille. (Elle achève doucement.) Si je deviens vieille. Pas maintenant. 
                               
Fiche technique :

Editeur: La Table Ronde               Date d'édition : Mars 2008 (1ère édtion, 1947)               128 pages


Pour aller plus loin :

Voir Antigone, ci-dessus, pièce mise en scène par N. Biançon, en 2003

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire